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Chaque ann茅e, gouvernements, journalistes, sp茅cialistes du d茅veloppement et autres attendent impatiemment la publication du Rapport sur le d茅veloppement humain du Programme des Nations Unies pour le d茅veloppement. Ce rapport est assorti d鈥檜n classement par pays en fonction notamment de l鈥檈sp茅rance de vie, de l鈥檃lphab茅tisation et de la qualit茅 de vie. Une fois le rapport publi茅, les gouvernements et les citoyens des pays en t锚te du classement se f茅licitent de leurs r茅sultats. Ceux dont les r茅sultats laissent 脿 d茅sirer, comme la R茅publique d茅mocratique du Congo, class茅e derni猫re en 2013 en Afrique, font l鈥檕bjet de critiques.

Lorsque le PNUD a annonc茅 en 2012, la publication prochaine de son tout premier Rapport sur le d茅veloppement humain en Afrique, beaucoup s鈥檃ttendaient 脿 ce que celui-ci contienne un classement g茅n茅ral par pays. Au lieu de cela, le rapport r茅gional portait sur le th猫me 芦Vers une s茅curit茅 alimentaire durable禄, et comprenait des analyses et des recommandations sur ce sujet.

L鈥檃dministrateur du PNUD, Helen Clark, et l鈥檃ncien Directeur du Bureau r茅gional pour l鈥橝frique du Programme, Tegegnework Gettu, donnaient le ton dans les premi猫res pages. 芦J鈥檃i l鈥檈spoir que ce premier Rapport sur le d茅veloppement humain en Afrique permettra de relancer le d茅bat sur les moyens d鈥檃ssurer une s茅curit茅 alimentaire durable 鈥� et qu鈥檌l d茅bouchera sur des actions plus d茅cisives禄, 茅crit Mme Clark.

La pr茅face de M. Gettu r茅sonne comme un appel provocateur 脿 l鈥檈ncontre des dirigeants africains. 芦L鈥橝frique n鈥檈st pas condamn茅e 脿 mourir de faim禄 茅crit-il. 芦Cette attitude porte atteinte 脿 sa dignit茅 et freine son potentiel... Le continent doit cesser de d茅pendre des autres pour se nourrir... Ce rapport n鈥檃urait lieu d鈥櫭猼re si les gouvernements africains avaient r茅pondu aux aspirations de leurs peuples au cours des 30 derni猫res ann茅es. Un quart de la population de l鈥橝frique subsaharienne ne souffrirait pas de sous-alimentation et un tiers des enfants africains n鈥檃ccuserait pas de retard de croissance禄.

L鈥檃ncien pr茅sident du Nig茅ria, Olusegun Obasanjo, rench茅rit en d茅clarant que les dirigeants africains devraient faire l鈥檕bjet de poursuites judiciaires li茅es 脿 la production alimentaire. 芦Le rapport nous dit ce que nous savons d茅j脿: la pauvret茅 de l鈥橝frique est l鈥櫯搖vre des dirigeants africains.禄

Lors de la r茅volution verte en Asie de nombreux pays asiatiques ont consacr茅 jusqu鈥櫭� 20% de leur budget 脿 l鈥檃griculture, alors que les pays africains ne d茅pensent actuellement qu鈥檈ntre 5% et 10% de leur budget pour ce secteur. Et ce, malgr茅 l鈥檈ngagement pris en 2003 par les dirigeants africains de consacrer au moins 10% de leur budget national 脿 l鈥檃griculture. A l鈥檋eure actuelle, les d茅penses militaires en Afrique d茅passent les d茅penses agricoles.

La faim malgr茅 l鈥檃bondance

芦La faim et la malnutrition persistent sur un continent au vaste potentiel agricole,禄 fait observer M. Gettu. 芦L鈥橝frique poss猫de les connaissances, les technologies et les moyens permettant d鈥櫭﹔adiquer la faim et l鈥檌ns茅curit茅 alimentaire.禄

L鈥橝frique subsaharienne est la r茅gion du monde qui connait la plus grande ins茅curit茅 alimentaire et o霉 la pauvret茅 est particuli猫rement alarmante, selon le PNUD. Jusqu鈥櫭� 25% des 856 millions d鈥橝fricains sont sous-aliment茅es et 15 millions sont expos茅s au risque de famine au Sahel ainsi que dans la Corne de l鈥橝frique.

La d茅t茅rioration de la situation alimentaire en Afrique subsaharienne temp猫re les rapports 茅logieux sur la croissance rapide de certaines 茅conomies, dont le taux annuel a atteint 5% 脿 6% au cours des dix derni猫res ann茅es. Mme Clark souligne que, 芦les progr猫s rapides de l鈥櫭ヽonomie africaine n鈥檕nt pas suffi 脿 assurer la s茅curit茅 alimentaire et une large part de la population souffre encore de la faim禄.

Elle sollicite des solutions coordonn茅es possibles. 芦Pour assurer 脿 tous les Africains un avenir ax茅 sur la s茅curit茅 alimentaire, il convient de recentrer les actions sur tous les domaines cl茅s du d茅veloppement.禄鈥� Sans routes carrossables, par exemple, les exc茅dents alimentaires ne peuvent 锚tre distribu茅s sur les march茅s.

Des mesures importantes 脿 prendre

Il est possible d猫s 脿 pr茅sent de prendre des mesures appropri茅es pour endiguer l鈥檌ns茅curit茅 alimentaire. Le rapport du PNUD 茅num猫re certaines d鈥檈ntre elles: 芦Am茅liorer la productivit茅 agricole des petits exploitants; accro卯tre l鈥檈fficacit茅 des politiques nutritionnelles, visant prioritairement les enfants; renforcer la r茅silience des communaut茅s et des foyers face aux chocs; et d茅velopper la participation et l鈥檃utonomisation des individus, en particulier des femmes et des populations rurales pauvres禄.

De nombreux dirigeants africains sont apparemment d鈥檃ccord avec ces mesures. C鈥檈st ainsi que la premi猫re femme 茅lue pr茅sidente en Afrique, la lib茅rienne Ellen Johnson-Sirleaf, consid猫re que les femmes jouent un r么le 芦critique et essentiel禄 dans le maintien de la s茅curit茅 alimentaire. Selon elle, si les femmes disposaient d鈥檜n meilleur acc猫s 脿 l鈥櫭ヾucation et aux ressources agricoles, telles que les terres, les capitaux et la main d鈥櫯搖vre, la productivit茅 pourrait 锚tre augment茅e de 20%. Sa position s鈥檌nspire du rapport, qui exhorte les pays 脿 芦mettre fin 脿 des d茅cennies de pr茅jug茅s contre les femmes et l鈥檃griculture禄; en effet, si l鈥檕n 茅duque les femmes, il peut 锚tre plus facile de r茅duire la malnutrition chez les enfants si les revenus du m茅nage augmentent. C鈥檈st en Afrique que l鈥檃cc猫s des femmes aux terres est le plus restreint.

L鈥檃ncien pr茅sident kenyan, Mwai Kibaki, a d茅clar茅 que le bien-锚tre physique et mental des individus 茅tait li茅 脿 la consommation d鈥檃liments nutritifs. 芦Leur consommation, a-t-il ajout茅, permet aussi aux gens de mettre 脿 profit leurs libert茅s et leurs capacit茅s dans diff茅rents domaines禄. Le Kenya est consid茅r茅 comme un pays dont la situation en mati猫re de s茅curit茅 alimentaire est extr锚mement pr茅occupante. Le Pr茅sident Kibaki a indiqu茅 que, lors de son mandat, cinq ann茅es de s茅cheresse avaient eu un impact n茅faste sur l鈥檃griculture. Ce secteur s鈥檈st toutefois redress茅 passant d鈥檜ne croissance n茅gative de 2,3% en 2009 脿 plus de 6,3%.

Selon les analystes, l鈥檃griculture est le principal moteur de l鈥櫭ヽonomie k茅nyane. D鈥檃pr猫s le FMI, celle-ci devrait conna卯tre une croissance de 6,2% cette ann茅e. L鈥檃n dernier, le pr茅sident Uhuru Kenyatta a annonc茅 que son gouvernement aiderait les agriculteurs 脿 s鈥櫭﹒uiper d鈥檕utils d鈥檈xploitation moderne permettant de 芦r茅volutionner禄 l鈥檃griculture.

L鈥橝frique doit n茅anmoins affronter des obstacles en ce qui concerne son d茅veloppement agricole. Le changement climatique aura un impact n茅gatif sur ce secteur. Selon feu le premier ministre 茅thiopien Meles Zenawi 芦l鈥橝frique est tr猫s sensible aux variations agroclimatiques禄. M. Zenawi soulignait que 芦le changement climatique exacerbe le probl猫me de l鈥檌ns茅curit茅 alimentaire.禄 Les r茅gions semi-arides entre le S茅n茅gal et le Tchad et la Corne de l鈥橝frique, en particulier Djibouti, l鈥櫭塼hiopie, le Kenya et la Somalie, subissent des conditions climatologiques d茅favorables, estime le Rapport sur le d茅veloppement humain en Afrique.

Outre la s茅cheresse, la famine fait aussi souvent la manchette des journaux, m锚me si les disparit茅s d鈥檃cc猫s 脿 la nourriture dues 脿 l鈥檌nsuffisance des revenus sont tout autant probl茅matiques. 芦Les crises silencieuses que sont la malnutrition chronique et la faim saisonni猫re ne re莽oivent pas toute l鈥檃ttention voulue禄, indique le rapport. L鈥檃ccroissement de la production agricole ne garantit pas n茅cessairement la s茅curit茅 alimentaire, 脿 moins qu鈥檌l s鈥檃ccompagne d鈥檃m茅liorations en mati猫re d鈥檃cc猫s aux soins m茅dicaux, d鈥檜ne am茅lioration des routes, de la cr茅ation de plus d鈥檈mplois et l鈥檃utonomisation des femmes.

Points positifs

Malgr茅 la situation alimentaire d茅plorable de l鈥橝frique subsaharienne, on peut citer de nombreux points positifs, notamment au Nig茅ria o霉 le gouvernement a lanc茅 un Programme de transformation du secteur agricole, qui devrait assurer l鈥檃utosuffisance alimentaire et la cr茅ation de 3,5 millions d鈥檈mplois d鈥檌ci 2015. Le Ghana a d茅j脿 r茅duit sa pauvret茅 de moiti茅 en favorisant les cultivateurs de cacao, devenant ainsi le premier pays d鈥橝frique subsaharienne 脿 atteindre le premier des objectifs du Mill茅naire pour le d茅veloppement : r茅duire de moiti茅 le nombre de personnes souffrant de la pauvret茅 et de la faim d鈥檌ci 2015.

Le Malawi a entam茅 un vaste programme de subvention 脿 l鈥檃chat de semences et d鈥檈ngrais et transform茅 son d茅ficit alimentaire en un exc茅dent de 1,3 million de tonnes en deux ans 脿 peine. Au S茅n茅gal, le taux de malnutrition infantile qui 茅tait de 34% en 1990 est pass茅 脿 20% en 2005 gr芒ce 脿 une augmentation du budget agricole. En faisant passer la part consacr茅e 脿 l鈥檃griculture dans son budget de 1,6% en 2008 脿 7,7% en 2009, la Sierra Leone a produit 784 000 tonnes de riz, d茅passant ainsi l鈥檕bjectif de 550 000 tonnes qu鈥檈lle s鈥櫭﹖ait fix茅e.

Alors que le continent affiche des taux de croissance 茅conomique record, il doit se d茅p锚cher d鈥檃gir pour nourrir sa population. Les dirigeants africains actuels parviendront-ils 脿 atteindre cet objectif ?听