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Les entreprises de Zambie commencent 脿 entrevoir la r茅alit茅 : si elles n'adoptent pas des mesures efficaces de lutte contre le VIH/sida, elles courent le risque de voir leur main d'oeuvre d茅cim茅e. "L'effet d茅vastateur du VIH/sida sur les ressources humaines de l'entreprise est une grande pr茅occupation", explique Chileshe Kapwepwe, directrice de la National Airports Corporation Limited (NACL), soci茅t茅 publique charg茅e de la gestion des a茅roports zambiens. En effet, dit-elle, il y a de plus en plus de victimes parmi les employ茅s, y compris parmi les 茅l茅ments "les plus qualifi茅s, les plus exp茅riment茅s et les plus productifs". Cette situation a encourag茅 la NACL 脿 joindre un nombre croissant d'entreprises zambiennes qui adoptent des mesures et des programmes destin茅s 脿 faire face aux cons茅quences 茅conomiques et sociales de la maladie.

Dans un pays o霉 une personne sur cinq appartenant au groupe d'芒ge actif sur le plan sexuel et productif sur le plan du travail est s茅ropositive, les m茅nages, les 茅glises, l'administration et les autres institutions ne sont pas seuls 脿 锚tre affect茅s par le VIH/sida. Le secteur des entreprises est 茅galement touch茅 par ce ph茅nom猫ne. Le taux croissant de mortalit茅 enregistr茅 chez les employ茅s a de graves r茅percussions 茅conomiques, qui se manifestent par le nombre d'heures de travail perdues, par les indemnit茅s vers茅es aux travailleurs malades et mourants et 脿 leurs survivants, et par la hausse des co没ts de la formation r茅serv茅e aux nouveaux employ茅s.

Prot茅ger l'investissement

Comme l'茅pid茅mie a tendance 脿 emporter les 茅l茅ments les plus qualifi茅s et les plus productifs de la population, elle entrave s茅rieusement les efforts de l'ensemble de l'茅conomie zambienne pour 茅largir l'assise de ses ressources humaines et accro卯tre la productivit茅 globale. Les chefs d'entreprise savent bien qu'ils doivent non seulement faire face 脿 la perte de leurs propres ressources humaines, mais 茅galement aux risques que repr茅sente le VIH/sida pour l'investissement et la croissance en g茅n茅ral.

Les taux de mortalit茅 茅lev茅s li茅s 脿 la maladie risquent par ailleurs d'avoir des effets n茅gatifs sur les actionnaires et de les faire h茅siter 脿 investir dans les entreprises, craint pour sa part Albert Wood, pr茅sident du Conseil d'administration de la State Insurance Corporation de Zambie. A son avis, "il devient imp茅ratif d'茅viter cette menace imminente 脿 l'investissement et 脿 la croissance 茅conomique". Sa soci茅t茅 a donc adopt茅 une s茅rie de mesures contre la pand茅mie et distribue notamment des pr茅servatifs masculins et f茅minins sur le lieu de travail. Comme d'autres programmes similaires, celui-ci garantit la confidentialit茅 aux employ茅s.

Pour sa part, la Electricity Supply Corporation de Zambie (ZESCO), soci茅t茅 qui a le monopole 茅nerg茅tique dans le pays, redoute que sa position de fournisseur unique d'茅nergie hydro茅lectrique soit remise en question si l'茅pid茅mie poursuit ses ravages dans les effectifs. Pour y parer, la soci茅t茅 a lanc茅 un programme qui comprend la distribution d'antir茅troviraux aux employ茅s infect茅s et 脿 leurs conjoints. La soci茅t茅 assume 75 % des frais encourus et les travailleurs 25 %.

"La direction a examin茅 la mani猫re dont nous perdions notre personnel exp茅riment茅", a indiqu茅 un porte-parole de la soci茅t茅, Angela Cifire. A ceux soucieux du co没t du programme, elle r茅plique que "ce qui est important ce n'est pas le co没t, mais ce qu'il peut nous rapporter".

Pour consolider et coordonner ces efforts, les soci茅t茅s priv茅es ont form茅 la Business Coalition contre le VIH/sida de Zambie (ZBCA). Cette association a 茅t茅 constitu茅e apr猫s la visite d'un groupe de chefs d'entreprise zambiens 脿 la Business Coalition de la Tha茂lande, qui s'est d茅roul茅e en 2000 sous les auspices de l'ONU. Les objectifs de la ZBCA comprennent la mobilisation des milieux d'affaires contre le VIH/sida, l'adoption de mesures visant 脿 att茅nuer l'impact de la maladie sur les effectifs des entreprises, le renforcement et le soutien accord茅 aux campagnes de pr茅vention et de contr么le du virus VIH et la facilitation des contacts entre les entreprises et les services techniques et communautaires.

Sous la direction de l'ancien pr茅sident Kenneth Kaunda, devenu un militant farouche contre le sida, la Coalition regroupe plus d'une quarantaine de soci茅t茅s (de nombreuses autres entreprises, dont des PME, ont adopt茅 certaines formes de programmes anti-VIH/sida). La Coalition dispense par ailleurs une formation aux 茅ducateurs des filiales des soci茅t茅s membres, qui deviennent des poins de contact pour toutes questions ayant trait 脿 la pr茅vention, aux soins et aux antir茅troviraux.

Les syndicats zambiens appuient les initiatives des entreprises. Leurs repr茅sentants si猫gent dans les commissions mixtes direction-personnel charg茅es de revoir les programmes de soins. "Si les ouvriers souffrent du VIH/sida, les employeurs seront tent茅s de les licencier pour cause de manque de rendement", redoute le chef du Congr猫s des syndicats zambiens, Leonard Hikaumba.

Lutter contre la discrimination

L'ostracisme dans lequel la soci茅t茅 zambienne maintient les personnes atteintes du VIH/sida demeure un obstacle de taille. Faute d'aborder ce probl猫me, estime le directeur g茅n茅ral du ZBCA, Chileya Nkandu, la simple introduction de programmes antir茅troviraux et d'autres mesures anti-sida risque de ne r茅gler cette question qu'脿 "moiti茅".

Pour encourager les employ茅s infect茅s 脿 s'associer 脿 ces efforts, les programmes mis en place par les entreprises s'engagent 脿 respecter la confidentialit茅 des informations fournies par les employ茅s et 脿 茅viter la discrimination 脿 leur 茅gard s'ils sont contamin茅s.

La National Airports Corporation Limited, par exemple, qui distribue des antir茅troviraux aux employ茅s infect茅s et 脿 leurs conjoints, s'engage par ailleurs 脿 ne soumettre aucun employ茅 potentiel au test de d茅pistage du sida au moment de l'embauche. Tout en encourageant son personnel 脿 se soumettre volontairement aux s茅ances d'orientation et aux tests m茅dicaux, l'entreprise s'engage 脿 n'adopter aucune mesure discriminatoire 脿 l'encontre du personnel s茅ropositif dans sa politique de promotion, de formation, de mutation ou d'attribution d'avantages sociaux.

Les autorit茅s reconnaissent par ailleurs que la discrimination peut nuire aux efforts de lutte contre la maladie. "On sait bien que les probl猫mes d'ostracisme et de discrimination, s'ils ne sont pas abord茅s, risquent de compromettre nos efforts pour vaincre l'茅pid茅mie", d茅clare le Vice-Pr茅sident zambien Nevers Mumba. "C'est parce que l'ostracisme, le silence et la discrimination, de m锚me que le manque de confidentialit茅, contribuent 脿 affaiblir les programmes de pr茅vention, de soins et de traitement anti-VIH", pr茅cise-t-il.

Aucune loi n'interdit 脿 pr茅sent la discrimination 脿 l'茅gard des personnes atteintes du VIH; cependant, dans le droit zambien, une telle discrimination peut entra卯ner des sanctions p茅nales. Pour leur part, les autorit茅s se sont engag茅es 脿 faire respecter les mesures anti-discriminatoires d'ici 脿 2005. De leur c么t茅, des associations de d茅fense des victimes du VIH/sida font pression pour l'adoption d'une loi interdisant express茅ment la discrimination bas茅e sur la s茅ropositivit茅 d'une personne.

L'Organisation mondiale de la sant茅 (OMS) convient qu'il est important de sauvegarder les droits pour rendre les programmes anti-sida plus efficaces. "Le traitement doit 锚tre fond茅 sur le respect des droits de l'homme", affirme la repr茅sentante de l'OMS pour la Zambie, le Dr Stella Anyangwe.

R茅ponse multisectorielle

Les autorit茅s encouragent les initiatives des milieux d'affaires et ont elles-m锚mes adopt茅 des mesures anti-sida pour leurs propres employ茅s. En fait, tous les minist猫res ont des programmes et appliquent des mesures dans ce domaine. "Les programmes anti-VIH/sida sont co没teux", souligne le Ministre de la sant茅, Brian Chituwo, "mais seulement en apparence, car les b茅n茅fices tir茅s sont consid茅rables". Tous les minist猫res importants re莽oivent des antir茅troviraux du Minist猫re de la sant茅 et disposent aussi d'une enveloppe budg茅taire pour financer les campagnes de sensibilisation de leur personnel 脿 l'茅pid茅mie.

Au mois de d茅cembre 2003, 4,5 millions de dollars avaient 茅t茅 d茅bours茅s pour financer les programmes VIH/sida, indique le Ministre des finances et de la planification nationale, Ng'andu Magande. Dans le cadre du Programme national de r茅duction de la pauvret茅, six millions de dollars suppl茅mentaires ont 茅t茅 affect茅s l'ann茅e derni猫re 脿 l'achat de m茅dicaments.

Selon l'茅tude la plus r茅cente men茅e par le Minist猫re des finances et de la planification nationale, le taux de pr茅valence du VIH en Zambie en 2001-2002 茅tait de 18% pour les femmes et de 16% pour les hommes d'芒ge adulte. Par ailleurs, il y a environ 800 000 orphelins du sida dans le pays, et la moiti茅 des lits d'h么pital du pays sont occup茅s par des malades de l'茅pid茅mie.

"Un probl猫me global exige une solution globale", affirme Margaret Mwanakatwe, pr茅sidente du Conseil national contre le sida, organisme officiel qui coordonne les activit茅s anti-sida sur le plan national. En l'absence d'un rem猫de, les efforts portent sur la pr茅vention et les soins.

A ce jour, 10 000 Zambiens re莽oivent des antir茅troviraux, mais les autorit茅s esp猫rent faire passer ce nombre 脿 100 000, en vertu de la campagne 3 x 5 de l'OMS qui pr茅voit que trois millions de personnes recevront des antir茅troviraux d'ici 脿 2005. Pour que le nombre de r茅cipiendaires puisse augmenter en Zambie, les autorit茅s ont demand茅 600 millions de dollars de plus au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

Si cette demande est accept茅e, les organisations non gouvernementales qui ont des projets r茅alisables recevront probablement une part importante de ce montant, compte tenu du r么le important qu'elles jouent dans la lutte contre le fl茅au, en coop茅ration avec les autorit茅s. Dans ce cadre, les programmes de lutte contre le sida mis en place par les entreprises sur le lieu de travail permettront de d茅gager des renseignements pr茅cieux 脿 l'茅laboration de projets visant 脿 soigner et prolonger les vies d'autres Zambiens atteints du VIH/sida.